Décret n°87-848 du 19 octobre 1987 modifié par les décrets du 30 mars 1993 et du 7 août 2003
pris pour l'application de l'article 464 du code pénal et du troisième alinéa de l'article 276 du code rural et relatif aux expériences pratiquées sur les animaux
JO du 20 octobre 1987
MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE
Sur le rapport du garde des sceaux, ministre de la justice, du ministre de la défense, du ministre de l'équipement, du logement, de l'aménagement du territoire et des transports, du ministre de l'éducation nationale, du ministre des affaires sociales et de l'emploi, du ministre de l'industrie, des P. et T. et du tourisme et du ministre de l'agriculture,
Vu le code rural, et notamment son article 276 ;
Vu le code pénal, et notamment ses articles 453, 454 et R. 25 ;
Vu la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la
nature, ensemble les décrets no 77-1295, n° 77-1296 et n° 77-1297 du 25
novembre 1977 pris pour son application ;
Vu la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées
pour la protection de l'environnement, ensemble le décret n° 77 1133
du 21 septembre 1977 pris pour son application ;
Vu le décret n° 73-865 du 4 septembre 1973 relatif à l'application des
articles 215-1 à 215-5 et 283-1 à 283-4 du code rural ;
Vu le décret n° 78-1030 du 24 octobre 1978 modifié pris pour l'application
de l'article 2 de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations
classées ;
Vu le décret n° 80-791 du 1er octobre 1980 modifié pris pour l'application
de l'article 276 du code rural ;
Vu le décret n° 80-813 du 15 octobre 1980 relatif aux installations classées
pour la protection de l'environnement relevant du ministre de la défense
ou soumises à des règles de protection du secret de la défense nationale
;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 concernant les relations entre
l'administration et les usagers ;
Le Conseil d'Etat (section des travaux publics) entendu,
Décrète :
CHAPITRE 1er
Des expériences et des expérimentateurs
Section I
Des expériences
Art. 1er
- Sont licites les expériences ou
recherches pratiquées sur des animaux vivants à condition, d'une part, qu'elles
revêtent un caractère de nécessité et que ne puissent utilement y être substituées
d'autres méthodes expérimentales et, d'autre part, qu'elles soient poursuivies
aux fins ci-après :
Art. 2. -
- Ne sont pas considérées comme des expériences au sens
du présent décret :
Art. 3.
- Les expériences sur des animaux vivants qui peuvent
entraîner des souffrances doivent être pratiquées sous anesthésie générale
ou locale ou après recours à des procédés analgésiques équivalents, sauf
si la pratique de l'anesthésie ou de l'analgésie est considérée comme
plus traumatisante pour les animaux que l'expérience elle-même.
Lorsque les expériences sont incompatibles avec l'emploi d'anesthésiques
ou d'analgésiques, leur nombre doit être réduit au strict minimum. Sauf
exception justifiée, il ne peut être procédé, sans anesthésie ou analgésie,
à plus d'une intervention douloureuse sur un même animal.
Art. 4.
- Un animal ne doit pas être gardé en vie après une expérience
s'il risque de souffrir de façon prolongée ou permanente ou s'il doit
subir l'effet de dommages irréversibles ou durables. Il doit en ce cas
être sacrifié avant la fin de l'anesthésie ou le plus rapidement possible
lorsque l'expérience a été faite sans anesthésie.
Si un animal est gardé en vie, il doit recevoir dès la fin de l'expérience
les soins nécessaires à l'atténuation de sa souffrance.
Section 2
Des expérimentateurs
Art. 5.
- Toute personne qui se livre à des expériences sur les
animaux doit être titulaire d'une autorisation nominative délivrée, dans
les conditions prévues aux articles 10 et suivants du présent décret,
par le ministre de l'agriculture ou, à défaut, ne pratiquer que sous la
direction et le contrôle d'une personne titulaire de cette autorisation.
L'autorisation est générale ou spéciale. Le titulaire comme les personnes
qui travaillent sous sa direction et son contrôle ne peuvent pratiquer
d'expériences que dans les limites de l'autorisation.
Art. 6.
- Les expérimentateurs ne peuvent exercer leur activité que dans les locaux, les dépendances et au moyen des installations d'un établissement d'expérimentation agréé dans les conditions prévues aux chapitres III ou IV du présent décret.
CHAPITRE II
Des animaux d'expérience et de leur protection
Section 1
Des animaux d'expérience
Art. 7.
- Des animaux de toutes espèces peuvent être utilisés
à des expériences, sous réserve des restrictions édictées au titre de
la législation et de la réglementation applicables aux espèces protégées.
Le ministre de l'agriculture, le ministre chargé de la recherche et le
ministre chargé de la protection de la nature arrêtent conjointement la
liste des espèces que les établissements d'expérimentation, lorsqu'ils
ne procèdent pas eux-mêmes à l'élevage des animaux destinés à leur activité,
sont tenus de se procurer dans des établissements d'élevage déclarés selon
les modalités prévues aux chapitres III ou IV du présent décret. Cette
liste ainsi que ses mises à jour sont publiées au Journal Officiel de
la République française.
Art. 8.
- Lorsque l'application des dispositions du deuxième alinéa
de l'article 7 ne permet pas à un établissement d'expérimentation de se
procurer en quantité suffisante des animaux convenant aux besoins de la
recherche, cet établissement peut :
Section 2
De la protection des animaux d'expérience
Art. 9.
- Les responsables et le personnel des établissements
d'expérimentation et des établissements d'élevage ou de fourniture d'animaux
d'expérience sont tenus, à l'endroit des animaux qu'ils détiennent, aux
obligations qui découlent des dispositions de l'article 1er du décret
du 1° octobre 1980 susvisé.
En outre, les chiens, les chats et les primates sevrés qui se trouvent
dans ces établissements doivent être identifiés par un marquage individuel
et permanent.
CHAPITRE III
Des procédures d'autorisation, d'agrément et de déclaration
Section 1
De l'autorisation d'expérimenter
Art. 10.
- La demande d'autorisation d'expérimenter est adressée
au ministre de l'agriculture par lettre recommandée avec demande d'avis
de réception. Une copie en est adressée au ministre dont relève l'activité
principale du demandeur.
Un arrêté conjoint du ministre de l'agriculture et des ministres chargés
de la recherche, de l'enseignement supérieur, de l'éducation nationale,
de la santé, de l'industrie et de la protection de la nature fixe la liste
des diplômes et des formations spéciales dont doivent justifier les demandeurs
de l'autorisation d'expérimenter.
Le dossier de la demande doit comporter la justification que le demandeur
n'a pas encouru de condamnation pour infraction aux dispositions législatives
et réglementaires afférentes à la protection des animaux et de la nature,
ni de condamnation pénale ou disciplinaire pour des faits contraires à
l'honneur ou à la probité.
Art. 11
- Le ministre de l'agriculture peut restreindre l'étendue
de l'autorisation demandée ou l'assortir de toute condition qu'il juge
utile.
À défaut d'autorisation expresse ou de refus motivé du ministre de l'agriculture
avant l'expiration d'un délai de deux mois suivant la date de réception
de la demande, l'autorisation est réputée accordée.
Art. 12.
- L'autorisation d'expérimenter est valable dix ans et
renouvelable par tacite reconduction. Elle devient caduque si le titulaire
cesse d'exercer son activité ou s'il ne l'exerce plus dans les conditions
qui ont justifié l'octroi de cette autorisation.
Le ministre de l'agriculture peut, en cas de manquement aux dispositions
prévues au chapitre 1er au deuxième alinéa de l'article 10
du présent décret, retirer l'autorisation d'expérimenter, à titre temporaire
ou définitif, sans préjudice des poursuites pénales éventuellement exercées
contre son titulaire ou contre les personnes qui pratiquent sous sa direction
et son contrôle. Il peut également en modifier l'étendue.
Lorsque des manquements graves et répétés aux mêmes dispositions ont été
constatées par les agents de contrôle habilités à cet effet, le commissaire
de la République peut prononcer la suspension de l'autorisation, dont
il rend compte au ministre de l'agriculture.
Art. 13.
- Le ministre de l'agriculture tient à jour la liste des personnes qui détiennent une autorisation d'expérimenter . Il informe chaque année les autres ministres intéressés des autorisations qu'il a accordées, modifiées ou retirées.
Section 2
De l'agrément des établissements d'expérimentation
Art. 14.
- Pour tout établissement dans lequel doivent être pratiquées
des expériences sur les animaux une demande d'agrément doit être adressée
conjointement au ministre de l'agriculture et au ministre dont relève
l'activité de l'établissement par lettre recommandée avec demande d'avis
de réception.
Cette demande doit être accompagnée d'un dossier comportant :
Art. 15.
- L'agrément peut être général ou spécial, selon la vocation de l'établissement, la nature de ses installations et la qualification de son personnel. Il est accordé pour une durée de cinq ans par un arrêté conjoint du ministre de l'agriculture et du ministre dont relève l'activité de l'établissement, et renouvelable par tacite reconduction. Cet arrêté peut restreindre l'étendue de l'agrément demandé ou l'assortir de toute condition jugée utile par les ministres compétents.
Art. 16.
- L'agrément d'un établissement d'expérimentation peut être modifié ou retiré, à titre temporaire ou définitif, et en cas de non respect par l'établissement des dispositions des chapitres I et II du présent décret ou des conditions qui ont accompagné l'octroi de cet agrément.
Art. 17
- Le ministre de l'agriculture tient à jour la liste des établissements agréés. Il informe chaque année la commission instituée par l'article 27 du présent décret des agréments qui ont été accordés, modifiés ou retirés.
Section 3
Des établissements d'élevage et de fourniture d'animaux destinés à l'expérimentation
Art. 18.
- L'ouverture d'un établissement d'élevage ou de fourniture d'animaux destinés à l'expérimentation est subordonnée à une déclaration préalable au commissaire de la République du département où sont prévues les installations.
Art. 19.
- Valent déclaration au titre de l'article précédent :
CHAPITRE IV
Dispositions spéciales à l'expérimentation sur les animaux dans le domaine
de la défense nationale
Art. 20.
- Par dérogation aux
dispositions des articles 5 et 10 du présent décret, le ministre chargé
de la défense est seul compétent pour recevoir et pour instruire les demandes
d'autorisation d'expérimenter et pour accorder ou refuser les autorisations
lorsque les expériences envisagées mettent en cause le secret de la défense
nationale.
Les autorisations sont données par le ministre chargé de la défense dans
la limite des expériences nécessaires aux recherches qui relèvent de ses
attributions. Elles peuvent être retirées discrétionnairement.
Art. 21.
- Par dérogation aux dispositions de la section II du chapitre III ci-dessus, le ministre chargé de la défense est seul compétent pour agréer, dans les conditions qu'il détermine, les établissements d'expérimentation relevant de ses attributions.
Art. 22.
- Par dérogation aux dispositions de la section III du chapitre III ci-dessus, la déclaration d'un établissement d'élevage ou de fourniture d'animaux destinés à des établissements d'expérimentation relevant du ministre de la défense nationale est faite à l'autorité militaire.
CHAPITRE V
Contrôles et sanctions
Art. 23.
- Dans le cadre des compétences qui leur sont dévolues par l'article 283-1 du code rural, les
vétérinaires inspecteurs sont habilités à exercer, tant dans les établissements
d'expérimentation que dans les établissements d'élevage et de fourniture
d'animaux destinés à l'expérimentation, le contrôle de l'application des
chapitres I et II du présent décret. Toutefois, le contrôle du déroulement
des expériences mettant en cause le secret de la défense nationale ne peut
être exercé que par des vétérinaires spécialement habilités à cet effet
par l'autorité militaire.
Les agents techniques et les techniciens des services vétérinaires du ministère
de l'agriculture sont habilités, dans le cadre des compétences et dans les
limites prévues à l'article 283-2 du code rural, à exercer le contrôle des
établissements d'élevage et de fourniture d'animaux destinés à l'expérimentation.
Art. 24.
- Toute personne pratiquant des expériences sur des animaux doit être en mesure de présenter aux agents de contrôle l'autorisation prévue par l'article 5 du présent décret ou l'avis de réception de sa demande, si l'autorisation a été tacite. Elle doit, à défaut, justifier qu'elle pratique sous la direction et le contrôle d'une personne titulaire d'une telle autorisation.
Art. 25.
- Tout responsable d'un établissement d'expérimentation ou d'un établissement d'élevage ou de fourniture d'animaux destinés à l'expérimentation doit tenir et être en mesure de présenter à toute réquisition des agents de contrôle un registre où est indiquée l'origine des animaux se trouvant dans l'établissement.
Art. 26.
- Toute infraction aux dispositions des articles 8 14, 15, 16, 18, 24 et 2S du présent décret sera punie des peines prévues aux articles R. 38 et R. 39 du code pénal.
CHAPITRE VI
De la Commission nationale de l'expérimentation animale
Art. 27.
- Il est institué
auprès du ministre chargé de la recherche et du ministre de l'agriculture
une commission nationale de l'expérimentation animale. Cette commission
donne son avis sur tout projet de modification de la législation ou de la
réglementation relative à l'expérimentation animale.
Elle peut également être consultée par les ministres auprès desquels elle
est placée, donner des avis et faire toute proposition qu'elle juge utile
sur :
Art. 28.
- La Commission nationale de l'expérimentation animale
est présidée par un membre du Conseil d'Etat en activité ou en retraite,
désigné pour six ans par le vice-président du Conseil d'Etat.
Elle comprend en outre :
Art. 29.
- Les membres de la Commission nationale de l'expérimentation animale sont remplacés en cas de démission, de décès ou de cessation des fonctions au titre desquelles ils ont été nommés. Le mandat des nouveaux membres expire à la date à laquelle aurait normalement pris fin celui de leur prédécesseur.
Art. 30.
- La Commission nationale de l'expérimentation animale
se réunit sur convocation de son président et au moins une fois par an.
Elle peut également se réunir à la demande du tiers de ses membres.
Son secrétariat est assuré par les services du ministre chargé de la recherche.
Art. 31.
- Le président de la Commission nationale de l'expérimentation animale peut appeler à participer aux séances de la commission, à titre consultatif et sur un point déterminé de l'ordre du jour, toute personne dont il estime opportun de recueillir l'avis.
Art. 32.
- La Commission nationale de l'expérimentation animale élabore son règlement intérieur, par lequel sont notamment fixées les conditions de représentation des membres absents ou empêchés et les modalités des scrutins.
Art. 33.
- La Commission nationale de l'expérimentation animale est assistée d'un comité technique chargé notamment d'assurer la concertation entre les organismes producteurs et les organismes utilisateurs d'animaux d'expérience. Les membres de ce comité, qui peuvent être pris au sein de la commission ou en dehors d'elle, sont nommés par arrêté conjoint du ministre de l'agriculture et du ministre chargé de la recherche de façon que soit assurée au sein du comité une représentation équilibrée des intérêts en présence.
CHAPITRE VII
Dispositions finales et transitoires
Art. 34.
- Les articles R 24-14 à R 24-31 du code pénal sont abrogés.
Art. 35.
- Les autorisations d'expérimentation en vigueur à la date de publication du présent décret deviendront caduques au terme d'un délai de deux ans suivant la publication de l'arrêté prévu par l'article 10. Elles peuvent être modifiées, retirées et suspendues dans les conditions prévues par l'article 12. De nouvelles demandes d'autorisation devront être présentées dans le même délai.
Art. 36.
- En ce qui concerne les établissements d'expérimentation existant à la date de publication du présent décret une demande d'agrément devra être présentée dans le délai d'un an suivant la publication de l'arrêté prévu par l'article 14.
Art. 37.
- Le garde des sceaux et ministre de la justice, le ministre de la défense, le ministre de l'équipement, du logement, de l'aménagement du territoire et des transports le ministre de l'éducation nationale, le ministre des affaires sociales et de l'emploi, le ministre de l'industrie, des P. et T. et du tourisme, le ministre de l'agriculture, le ministre délégué auprès du ministre de l'équipement, du logement, de l'aménagement du territoire et des transports, chargé de l'environnement, le ministre délégué auprès du ministre de l'éducation nationale, chargé de la recherche et de l'enseignement supérieur, et le ministre délégué auprès du ministre des affaires sociales et de l'emploi, chargé de la santé et de la famille, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal Officiel de la République Française.
Fait à Paris, le 19 octobre 1987,
Par le Premier ministre :
JACQUES CHIRAC
Le ministre de l'agriculture ,FRANÇOIS GUILLAUME
Le garde des sceaux ministre de la justice, ALBIN CHALANDON
Le ministre de la défense, ANDRÉ GIRAUD
Le ministre de l'équipement du logement, de l'aménagement du territoire
et des transports, PIERRE MÉHAIGNERIE
Le ministre de l'éducation nationale, RENÉ MONORY
Le ministre des affaires sociales et de l'emploi, PHILIPPE SÉGUIN
Le ministre de l'industrie des P. et T. du tourisme, ALAIN MADELIN
Le ministre délégué auprès du ministre de l'équipement du logement de
l'aménagement du territoire et des transports chargé de l'environnement,
ALAIN CARIGNON
Le ministre délégué auprès du ministre de l'éducation nationale chargé
de la recherche et de l'enseignement supérieur, JACQUES VALADE
Le ministre délégué auprès du ministre des affaires sociales et de l'emploi
chargé de la santé et de la famille, MICHÈLE BARZACH